Abdoul Mbaye, candidat à la présidentielle : «Il faudra mettre en vente l’avion du Président comme signal fort»

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WalfQuotidien Vous êtes candidat à la présidentielle de 2024 et vous avez promis de faire un seul mandat de transition. Cinq ans sont-ils suffisants pour réaliser votre programme ?

Abdoul MBAYE : Au cours de ma carrière j’ai dirigé trois banques, parmi d’autres établissements de crédit, avec pour mission de les redresser car elles étaient en difficulté, et parfois en situation de devoir être fermées. Si cela a pu se produire trois fois, c’est que je ne me suis jamais éternisé dans une des fonctions de directeur général. J’ai toujours considéré qu’il m’était demandé de réussir une mission, et lorsqu’achevée, j’ai demandé à partir. Dans un continent où les chefs d’Etat se considèrent indispensables, et sont plus que souvent dans des démarches visant à prolonger au maximum leur séjour au sein du palais présidentiel, parfois pour la vie, il est temps de donner l’exemple de la gestion d’un pays dans une durée limitée avec des résultats probants. Cela est possible. Il suffit de recevoir une mission clairement définie. Celle que l’organisation «Appel 2024» et mon parti ACT m’assignent consiste d’abord à effacer le recul démocratique du Sénégal vécu sous le règne de Macky Sall. Il ne s’agit donc que de textes à corriger, amender et parfois, ce qui est encore plus simple, à restaurer. Les matériaux pour ce faire sont déjà rendus disponibles par les travaux des Assises nationales, la Commission nationale de réforme des institutions, les rapports d’audit sur le processus électoral et le fichier électoral.

Le second volet de la mission consiste en une restauration des fondamentaux économiques et financiers de notre pays. Il s’agit de redonner des bases saines à une véritable émergence possible, et de définir les repères principaux qui devront guider la mise en œuvre de la politique économique, sociale et environnementale du Sénégal.

Dès lors que tous ces choix de rupture auront été faits sur des bases consensuelles, acceptées parce que d’abord expliquées et justifiées, il sera aisé d’entrer dans une continuité qui ne dépendra pas d’un homme se jugeant indispensable. Le programme global, les projets le composant, seront devenus ceux d’une équipe motivée à laquelle d’autres succèderont sous le contrôle de leur peuple. Les équipes devront être constituées, comme cela figure dans le contenu de mon serment, par des femmes et des hommes au parcours reconnu, motivés par leur patriotisme et le souci d’entrer par leurs réalisations dans l’histoire de leur Nation.

Il y a beaucoup de priorités au Sénégal. En cas de victoire, quelle sera la priorité des priorités ?

La question que vous posez est primordiale. Seront prioritaires toutes les mesures qui permettront, au sortir d’un mandat de cinq années, de pouvoir objectivement reconnaître l’amélioration des conditions de vie et du pouvoir d’achat des Sénégalais. Les priorités sont nombreuses et toutes importantes dans un pays aussi pauvre que le Sénégal. La gouvernance d’un pays dans un tel état consiste donc en un choix minutieux de celles auxquelles il convient de donner un rang élevé, sans d’ailleurs les hiérarchiser, en ce sens qu’elles doivent être souvent traitées simultanément.

La rédaction des projets de texte réformant le fonctionnement des institutions peut immédiatement démarrer. Sans attendre, il sera essentiel de mettre fin à la gabegie organisée des deniers de l’Etat afin que l’abandon des dépenses budgétaires de confort et les ressources perdues par la corruption augmentent la capacité d’intervention de l’Etat au profit des plus faibles et de la relance économique. Il faudra mettre en vente l’avion du Président comme signal fort d’entrée dans une ère qui ne sera plus celle de gouvernants à la recherche d’aise, de confort et d’enrichissement illicite, mais résolument soucieux de se mettre au service de leurs populations.

Comme en avril 2012, il conviendra de redonner toute la priorité qui sied à la lutte contre la faim qui sévit dans les zones rurales et trouver les moyens d’une vraie relance agricole d’abord basée sur la culture de céréales, mais aussi de l’arachide qui reste la source principale des revenus monétaires des paysans. Cette relance de l’agriculture, dont l’échec est aujourd’hui artificiellement masqué par des statistiques mensongères aura un double effet : elle portera une amélioration du pouvoir d’achat dans les campagnes et permettra une réduction des prix alimentaires dans les villes. Il faudra également très vite lancer les études de diversification de nos productions agricoles et identifier très précisément toutes les autosuffisances possibles.

Comme par le gouvernement que j’ai eu l’honneur de diriger en 2012, des axes seront dégagés afin de rapidement parvenir à une baisse des coûts de l’énergie avec de nouveau un objectif double : restaurer la compétitivité de notre économie, créer les conditions d’une baisse des prix par l’offre, améliorer le pouvoir d’achat des ménages par réduction des factures d’électricité.

Comme en 2012, la commande publique visera le lancement de chantiers identifiés par une double caractéristique : résoudre des problèmes récurrents et structurels pour améliorer les conditions de vie de nos populations (exemple des inondations), aussi permettre de maximiser la part locale de dépense budgétaire parce que correspondant à des travaux à haute intensité de main d’œuvre réalisables par des entreprises nationales.

Parmi les priorités figurent également la recherche d’amélioration immédiate de l’accès aux soins de santé par la réorganisation du système sanitaire, ou le lancement de travaux urgents sur la révision des contenus des enseignements dans nos écoles et universités afin de les adapter à notre culture et aux besoins de notre économie et de notre mode de vie.

L’année 2024 va coïncider avec l’exploitation du gaz et du pétrole, ne risque-t-on pas d’assister «au tout pétrole» au détriment de l’agriculture par exemple ?

Ce serait une grave et dramatique erreur. Il faut tenir un langage de vérité aux Sénégalais. Ils doivent savoir que plusieurs pays sont restés très pauvres malgré le pétrole parce qu’ils ont abandonné les autres secteurs de leurs économies, et en particulier l’agriculture. Ils doivent également savoir que les recettes en hydrocarbures ne représenteront que peu du budget de l’Etat. Nos gouvernants ont malheureusement pris l’habitude de tromper le peuple par des chiffres à milliards, des slogans creux et des mirages. L’évolution positive du quotidien des Sénégalais dépendra moins du pétrole et du gaz que de la construction d’une économie faisant une place importante à la recherche de souverainetés d’abord alimentaire, mais aussi industrielles pour construire une économie autocentrée, placée dans un cercle vertueux de valeur ajoutée locale en progression constante. Les vraies potentialités de croissance se trouvent moins dans 150 milliards Cfa de recettes en hydrocarbures (52,7 milliards sont prévus en 2023) que dans plus de 1000 milliards de produits alimentaires importés chaque année. Se mettre résolument dans une démarche de substitution aux importations tant agricoles que de produits industriels, la production de ces derniers étant possible par notre artisanat renforcé et soutenu, est la voie nécessaire et devenue indispensable. Elle est celle qui créera le nombre d’emplois dont notre jeunesse a besoin, en même temps qu’elle rééquilibrera nos comptes extérieurs et alimentera le budget de l’Etat par les taxes générées.

Vous avez déposé une plainte contre Aliou Sall, Frank Timis, etc. Allez-vous réactualiser cette procédure judiciaire ?

C’est toute la justice sénégalaise qui devra se mettre à fonctionner normalement, et pas seulement sur une ou quelques affaires. C’est toute la justice qui devra reconstruire la confiance du peuple en elle, car aujourd’hui largement écornée. C’est une exigence pour la sauvegarde de notre démocratie. La fin de l’injustice ou de la justice à double vitesse pourra seule protéger le Sénégal contre la colère populaire qui gronde et la révolte que je vois poindre. Ceux qui nous dirigent, parce qu’enfermés dans leurs petits calculs politiciens de conservation du pouvoir, en oublient les leçons de l’histoire : la pauvreté, la faim et le manque d’espoir utilisent l’étincelle de l’injustice pour exploser en révoltes ou révolutions.

C’est un devoir pour le fils de magistrat que je suis de contribuer à redonner à notre pays une justice réputée et exemplaire en Afrique et à travers le monde. Mais au-delà de compter sur mon seul respect de la justice et des magistrats, il faudra des réformes profondes pour la rendre définitivement indépendante du pouvoir exécutif. La rencontre de mes convictions et de mon ascendance fait de cette réforme un point majeur de notre programme. Cependant, il ne faudra pas oublier d’également veiller à restaurer et à préserver une indépendance des magistrats à l’égard des parties.

Envisagez-vous de renégocier certains contrats déjà signés par le Président Macky Sall ?

Si ces contrats ont été signés en contradiction avec les intérêts du Sénégal, s’ils sont renégociables sans dommages ou si le «plus» de la renégociation est supérieur au «moins» des dommages, la réponse est: mille fois oui. «Les analyses avaient déjà démontré que l’Etat pouvait économiser de nombreux milliards de fcfa en arrêtant l’activité de la Sar tout en payant chacun de ses employés jusqu’à sa retraite»

La dernière mission du Fmi au Sénégal s’est inquiétée de la situation économique. Comment allez-vous concilier ces inquiétudes du Fmi et votre programme ?

Cette situation n’est pas une surprise. Il est heureux que le Fmi s’inquiète enfin du déficit budgétaire et du niveau de la dette publique. Le tout dans un contexte d’inflation et de baisse de pouvoir d’achat des Sénégalais. Je me demande d’ailleurs à tout instant où pourrait se situer la réussite du régime de Macky Sall qui cherche à jouer des prolongations. Ces constats alarmants du Fmi auraient dû venir plus tôt, et je vous renvoie à une de mes contributions, publiée par votre journal le 8 octobre 2019 si je ne me trompe. Tout cela était prévisible, et le Fmi, par ses précautions orales diplomatiques et ses fausses solutions, a en douceur accompagné les gouvernants du Sénégal vers le mur qui aujourd’hui se dresse devant lui. Il y a donc plus de trois ans que j’appelais le Fmi à un discours de vérité sur la situation économique et financière du Sénégal et à la proposition de mesures fortes et courageuses.

L’un des paradoxes les plus bloquants de l’économie et des finances publiques sénégalaises est bien celui du coût de son énergie. Sans sa baisse, il ne saurait y avoir d’émergence au Sénégal. C’est une condition sine qua non figurant en tête de celles citées par le Plan Sénégal Émergent (Pse). Les tarifs en vigueur figurent cependant parmi les plus élevés de l’Afrique de l’Ouest. Pour ce qui concerne le prix de l’essence à la pompe, le Sénégal était 43ème sur 47 pays africains en janvier 2023. Les pays enclavés font mieux que le nôtre. Malgré cela, il faut les relever parce qu’ils sont trop subventionnés. Nous sommes donc en présence d’une situation particulièrement paradoxale.

L’ensemble de la filière énergétique et celle de la production d’électricité doivent être revues, et des décisions importantes prises. Entre le cours mondial des hydrocarbures et la tarification des produits à la pompe et de l’électricité il y a des intermédiaires majeurs que sont la SAR et la Senelec.

Premier ministre, et conscient que cet obstacle rendait impossible une accélération de la croissance sénégalaise, j’avais fait engager des études et analyses. Souvenez-vous des attaques que j’avais reçues parce que recherchant la disparition de la Sar. Cette conclusion n’était pas encore tombée, mais les analyses avaient déjà démontré que l’Etat pouvait économiser de nombreux milliards de francs Cfa en arrêtant l’activité de la Sar tout en payant chacun de ses employés jusqu’à sa retraite. Les bénéficiaires d’une telle anomalie étaient aisément identifiables. Ces conclusions sont-elles encore d’actualité ? Il faudra reprendre les analyses à l’aune du démarrage de la production d’hydrocarbures par le Sénégal. Il faudra toutefois éviter de se réfugier derrière le fallacieux prétexte d’un pouvoir indépendant de raffinerie, pour mettre en avant la sécurité d’approvisionnement en produits raffinés et leur coût le plus bas possible au bénéfice des entreprises et des ménages, et donc de la croissance de notre économie et du pouvoir d’achat des Sénégalais.

En ce qui concerne la Senelec, il était établi que la part des salaires dans le coût du kilowatt d’électricité produit était parfois plus de 2 fois supérieure à ce que l’on pouvait constater dans d’autres pays d’Afrique. Nous savons également que la Senelec a été transformée en une officine du régime en place avec ce que cela suppose comme affaires et scandales : souvenez-vous de l’affaire Akilee, ou de cette commande de poteaux en béton en 2019 à Excellec passée en gré-à-gré sur insistance de la présidence de la République malgré l’opposition du ministère des Finances : le coût des 2500 poteaux de moins de 500 millions de francs Cfa avait permis un marché de 36 milliards FCfa hors taxes. Il ne s’agit là que de petites parties visibles d’icebergs plutôt gros. Les réformes y sont donc indispensables car tout cela se fait aux dépens de la Nation tout entière et de l’avenir de notre jeunesse.

Dans mon livre «Servir» je proposais d’associer le personnel de la Senelec aux indispensables réformes; car il devrait être facile de leur faire prendre conscience de leur lourde responsabilité face à leur Nation.

Le déficit budgétaire traduit un train de vie anormal de l’Etat. C’est la conséquence de recrutements anormaux, d’un parc disproportionné de véhicules souvent de luxe, de frais et dépenses inutiles et très souvent gonflés par la corruption, de financement de projets non prioritaires. Il est aussi la conséquence d’une gouvernance globale qui se soucie avant tout de réussite politicienne par des politiciens nommés plutôt que de performances managériales. Les directions des entreprises des secteurs public et parapublic, celles de l’administration aussi, sont confiées à des femmes et à des hommes que le Président de la République, chef de parti, menace de «virer» dans l’hypothèse de performances électorales insuffisantes.

Les instructions données ressemblent à «faites du déficit pour faire gagner votre Président». Celles que nous donnerons après avoir choisi les responsables sur la base de leur compétence et de leur honnêteté seront les suivantes : «mettez-vous au service de votre Nation et redressez l’entreprise, la direction ou le service qui vous est confié, sachant que vous serez relevés pour tout échec de gestion, et poursuivis pour tout détournement sans qu’aucun coude ne bloque l’exploitation des rapports des corps de contrôle ou de l’Ofnac».

En ce qui concerne la dette, il faudra malheureusement un temps avant de pouvoir dégager de nouvelles marges. Nous avions pourtant averti de cette situation inévitable par un texte publié le 10 décembre 2017, lorsque le Président disait interdire le débat sur la dette publique parce que ne représentant aucun risque. Bien gouverner, c’est prévoir juste. Nous foncions déjà vers le mur à pleine vitesse. Il faudra donc emprunter moins pendant un moment et privilégier le recul du stock et du service de la dette comme conséquences d’un des échecs du régime en place. Il faudra mettre à profit cette période pour donner une place plus importante au Partenariat Public Privé (PPP) avec implication du maximum de citoyens résidant parmi nous ou de la diaspora : l’épargne sénégalaise peut être mobilisée par ce biais au bénéfice des Sénégalais dans le cadre de projets bien sélectionnés et non choisis pour faire travailler des entreprises étrangères ou satisfaire des égos présidentiels.

Envisagez-vous une sortie du Franc Cfa ?

Vous demanderiez de sortir de la monnaie africaine considérée comme la plus performante au regard des résultats obtenus sur le plan de la solidité de sa valeur externe, mais surtout de la maîtrise de la hausse des prix et donc de la protection des revenus des ménages par les pays qui l’utilisent en Afrique de l’Ouest ?

Je suis toutefois pour des réformes à engager. En concertation avec les partenaires du Sénégal au sein de l’Uemoa, elles doivent concerner le changement de la dénomination «Cfa», la suppression de la garantie donnée par la France et son remplacement par des accords cadre avec plusieurs pays prévoyant le recours à des prêts de facilité si les réserves en devise de la Bceao venaient à manquer, et le recours à un panier de devises pour en déterminer le taux de change par rapport aux autres devises du monde.

Le changement de dénomination n’apporte certes aucune «plus-value technique», mais il est important pour satisfaire une demande insistante des populations de la zone monétaire qui y voient un pas supplémentaire de souveraineté et de dignité.

La «garantie» qui serait apportée par la France n’a de sens que si l’on accepte que la Bceao serait incompétente pour assurer la gestion de la monnaie qu’elle émet, ce qui est loin d’être le cas. La compétence d’une Bceao sert à sauvegarder la valeur externe d’une monnaie, et lorsque le niveau des réserves en devises devient trop bas, elle doit être en mesure de trouver les solutions de sauvegarde à moyen terme ou immédiates, et de les reconstituer par des politiques appropriées monétaires et de change.

Enfin, il peut être difficile à tout esprit de comprendre un taux de change fixe et immuable, fonction de la conjoncture européenne en rapport avec celle du reste du monde. Réfléchissons donc à un taux de change fixe mais en rapport avec un panier de devises reflétant au plus près les structures des échanges extérieurs et de la dette extérieure de l’Uemoa.

Etes-vous partisan d’une monnaie unique dans la zone Uemoa ou Cedeao ?

La monnaie unique au sein de l’Uemoa existe. Maintenons-la ! La quitter ce serait perdre notre appartenance à une monnaie panafricaine qui a servi de modèle même à l’Europe ; ce serait sortir de l’Uemoa. Ce serait perdre le marché de l’union économique, ou au moins celui avec une monnaie unique qui facilite grandement les opérations commerciales. Choisissons plutôt la voie de son maintien et de sa réforme selon les pistes que je viens d’indiquer.

En ce qui concerne la monnaie unique de la Cedeao, je suis incapable de vous dire si l’Eco circulera d’ici vingt ou trente ans. Cependant n’en faisons pas une obsession de principe. L’objectif doit être de construire une zone monétaire optimale et non une zone monétaire la plus large possible. Personnellement j’accorde plus d’importance à la construction de complémentarités économiques qu’à la mise en place d’une zone monétaire qui n’aurait aucun sens sans ces complémentarités économiques. C’est la prise de conscience de cette exigence qui a transformé en 1994 la zone monétaire Umoa en union économique. La Cedeao gagnerait, plutôt que de poursuivre un lointain mirage, à réorienter dans un sens interne les flux commerciaux reliant les pays membres à des partenaires non-membres. Cela passe par des choix résolus de transformation de nos matières premières sur place (au lieu de les exporter hors de la zone) et parfois en commun, et le développement de nos productions agricoles, agro-industrielles et industrielles (au lieu de presque tout importer hors de la zone).

Pensez-vous que tous les Etats sont prêts pour le respect des critères de convergence ?

La conjoncture est plutôt celle d’un éloignement de ces critères qu’aucun membre ne respectait intégralement. C’est pourquoi j’évoquais à l’instant les vingt ou trente prochaines années probables avant que nous n’ayons des Eco dans les mains.

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