Guy Silva THIAM, expert financier et fondateur de IATB sur la loi de finances: «Le budget réel ne peut être connu qu’avec le vote par l’Assemblée de la Loi de Règlement»

Eco-Finance

Walf Quotidien: Le ministre ADD a annoncé un budget de 4589 Milliards pour 2021. Quelle lecture vous en faites ?

Guy Silva THIAM: La loi de finances initiale 2021 est projetée à 4589 Milliards contre 4300 Milliards en 2019 soit presque une hausse de 9%. Soit !!!! Il faut d’abord faire remarquer qu’une loi de finances initiale n’est qu’une base de travail. En effet, elle est appelée à être rectifiée en cours d’exercice par différentes Loi de finances rectificatives aussi bien en augmentation qu’en diminution ou même dans sa structuration.

Avec la COVID, la loi de finances 2019 a été plusieurs fois rectifiée, pour finalement être arrêtée à moins de 4000 Milliards. Le budget réel dont dispose l’Etat ne peut être connu qu’avec le vote par l’Assemblée de la Loi de Règlement.

Un autre élément à tenir en compte, c’est que le budget 2021 a été conçu comme un budget programme. Cela s’est traduit par des lignes d’engagement et dépenses selon les ministères. Par conséquent, présenter un budget global, si on reste dans la logique de budget programme, n’a que très peu d’intérêt. Il est plus pertinent de signaler, par le biais d’un communiqué détaillé ou d’un point de presse, les différents axes du budget 2021 afin de permettre une meilleure analyse et compréhension.

Un dernier élément à souligner sur le budget tient à sa formation. En d’autres termes, ce qui est bon à savoir c’est la nature des recettes budgétaires (recettes internes, douanes, endettement, transfert) mais aussi le déficit, s’il y’en a, projeté pour 2021. En effet, les recettes conditionnent les dépenses et leur nature donne une meilleure information sur la politique économique de l’Etat en cette période de relance.

L’Etat du Sénégal a récemment présenté son Plan de Relance et le PAP 2A, ces éléments sont-ils bien pris en compte dans le budget ?

Comme nous le disions supra, on a pas une information suffisante quant à la lecture du budget. Il est donc difficile de se prononcer. Cependant, hypothèse pour hypothèse, si les recettes douanières représentent une part importante du budget 2021 (plus importantes que les recettes fiscales) alors il faut en conclure que l’Etat mettre en place une politique encourageant l’importation et donc le « consommer étranger » en lieu et place du « consommer local ». Par conséquent, le Plan de Relance ne sera pas pour 2021 mais il est de facto reporté.

Si au contraire, on est dans une situation de forte prédominance de recettes intérieures alors les différents textes règlementaires pris par le ministre du commerce et celui des finances seront orientés vers un protectionnisme et un développement du « consommer local » et donc une mise en œuvre immédiate du Plan de Relance. En tout état de cause, une lecture du budget 2021, nous édifiera quant à l’effectivité du PRES et du PAP 2A.

L’Etat a décidé de mettre l’accent sur la consommation pour booster l’économie, qu’en pensez-vous ?

La création de richesse dépend du levier de la production ou de la consommation. L’Etat a décidé de privilégier la consommation. Reste à savoir comment il prévoit de doper cette consommation. En effet, pour qu’il y’ait consommation il faut un revenu et plus ce dernier est élevé plus en principe la consommation est importante.

La question simple et immédiate est la suivante : comment l’Etat va aider pour augmenter les revenus et donc la consommation ? Va-t-il réduire les impôts ? Va-t-il mettre en place des politiques de subventions afin de baisser les prix ? Toutes ces questions doivent trouver leurs réponses dans le budget 2021 ainsi que dans les textes législatifs et règlementaires qui seront pris. Mais le budget 2021 doit clairement marquer les orientations et les actions prévues.

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