Habib Ndao, directeur de l’OQSF : «Il est peu probable que les faillites de la SVB et du Crédit suisse aient des effets de contagion sur le système financier de l’UMOA»

à la une Eco-Finance

Walf Quotidien: Qu’est ce qui explique les faillites de la SVB et du Crédit suisse ?

Habib NDAO : Il faut préciser qu’il n’y a pas que la Sillycon Valley Bank (SVB), 16ième en termes de taille bilantielle aux États Unis qui est allée en cessation de paiement mais il y’a aussi la «Signature Bank» qui sont plus des banques régionales en Californie. Sur les facteurs explicatifs, il faut d’abord souligner que le management de la SVB a fait preuve d’une certaine légèreté dans sa gouvernance en privilégiant les bons du trésor à maturité longue et à taux fixe (Held To Maturity)  alors que les banques centrales ont augmenté par la suite les taux directeurs, ainsi la valeur de ces titres s’est fortement dépréciée.

Ensuite, les activités de SVB étaient  trop concentrées sur un seul domaine : les start-up de la Silicon Valley. Ainsi, durant la Covid, les banques centrales ont injecté des volumes importants de liquidités dans les start up et dans les fonds d’investissement qui ont placé ces ressources à la SVB, principale banque des Tech. Ladite banque avait choisi de recycler ces dépôts en achetant des bons du Trésor américain à taux fixe devenus non profitables à cause du renchérissement des taux directeurs. Enfin, la troisième erreur est que la SVB a  voulu être transparente en communiquant sur ces difficultés et au même moment demander une augmentation du capital, créant ainsi une certaine psychose dans le marché financier.

Pour le cas de la banque Crédit Suisse, première banque en Europe à trembler sous le choc des faillites bancaires aux États-Unis, est en train de payer le prix de ses 1 001 scandales (corruption, espionnage, fraude fiscale, etc).

Ne craignez-vous pas une contagion mondiale, comme ce fut le cas avec Lehman Brothers en 2008 ?

En plus des fonctions essentielles qu’elles remplissent, les banques jouent un rôle primordial et sont au cœur du système de gestion des paiements dans une économie. Les difficultés financières notées dans ces banques ont certes un phénomène de ” Bank Run “, retrait massif des dépôts, mais je doute que ces faillites en chaîne puissent créer un effet de domino sur le reste de l’écosystème financier mondial. Pour le cas des États-Unis, l’effet domino n’est pas à redouter pour le moment d’autant plus la Federal Deposit Insurance Corporation (FDCI) et la banque centrale des États Unis (FED) sont arrivées en pompiers pour préserver la confiance populaire dans le système financier (relance du processus de vente de la SVB, garantie des dépôts jusqu’à un plafond de 250 000 USD, etc).

La Banque Nationale Suisse a été contrainte d’être prêteuse en dernier (PDR) en faisant débloquer 50 milliards de dollars pour venir en aide à Crédit Suisse.

Ces faillites peuvent-elles avoir des effets sur les pays de l’Union, si  l’on sait que la Bceao et le Cfa dépendent pratiquement de la France?

Avec les modèles économiques des banques traditionnelles et la rigueur des politiques macro-prudentielles, depuis 2008, qui exigent des banques d’énormes réserves et de contraintes sur le plan réglementaire, il est peu probable qu’il y ait des effets  de contagion sur le système financier de l’UMOA.

Le député Mamadou Lamine Diallo a déclaré dans sa question économique que nos réserves de change sont au plus bas. C’est aussi votre avis ?

A la question de ce responsable POLITIQUE  il faut savoir que la BCEAO ce sont les États et les caisses de l’Etat ne sont ni jamais vides ni jamais pleines. Il existe toujours des dispositifs alternatifs pour s’ajuster. La BCEAO gère les réserves de change et dispose d’au moins 32 comptes dans plusieurs devises fortes, les réserves de change fluctuent en volume,  en hausse et en baisse,  au gré des exportations et des importations des pays au sein de l’union . Avec la commercialisation des hydrocarbures notre balance des paiements sera positivement impactée, en attendant l’Etat s’ajustera comme on le fait depuis 2013. En ce qui concerne le FMI, le Sénégal est actionnaire au Fonds donc c’est une relation de partenariat qui nous lie aux institutions du Bois de Brettons. La quasi-totalité des engagements que nous avons pris dans le cadre de l’ICPE ont été respectés sauf le sort du Groupe la Poste.

Le fait est que le Sénégal soit maintenant dépendant du Fmi qui a demandé la baisse des dépenses publiques, cela ne risque-t-il pas d’aboutir à un programme d’ajustement structurel?

Non, l’Etat du Sénégal n’a jamais attendu une injonction du FMI pour s’ajuster,  l’ajustement est permanent car il faut s’adapter aux chocs endogènes – exemple : déficit pluviométrique, invasion acridienne, etc, et aux chocs externes tels que les risques émergents ( virus, terrorisme) guerre entre la Russie et l’Ukraine,  les tensions politiques dans la sous-région,  les variations erratiques des monnaies et des “commodities” et que sais je ? Il faut noter que depuis 2014 le Sénégal a emprunté une trajectoire de croissance continue, ce qui rend les fondamentaux de notre  économie très robustes.

walfQuotidien

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *