BOUBACAR CAMARA, CANDIDAT DE LA COALITION FIPPU ALTERNATIVE CITOYENNE: «Offrir un nouveau souffle pour un avenir rassurant»

Politique

Beaucoup le considèrent comme un novice en politique, car il est surtout connu comme secrétaire général du ministère de Karim Wade. Pourtant, Boubacar Camara a grandi sous le harnais de la Gauche. Déjà en 1976, élève au Lycée Blaise Diagne, il a adhéré au RND du Professeur Cheikh Anta DIOP. Militant très engagé, il a vendu devant les feux rouges les journaux « SIGGI » et « TAXAW ». Puis, il a été membre fondateur de Ferñent, (l’Etincelle), journal de gauche.  Dans cet entretien accordé à Walf Quotidien, il décline les grandes lignes de son offre alternative et les raisons de son réengagement politique.

 Vous avez signé une pétition pour demander au président Macky SALL de revenir sur la signature d’une convention pour l’exploitation des mines de fer de la Falémé avec l’entreprise turque TOSYALI. Qu’est ce qui se trame derrière cette signature ?

Il s’agit, pour les candidats de l’opposition signataires de la pétition, de tirer la sonnette d’alarme pour éviter le bradage des ressources minières de notre pays.

Que reprochez-vous au gouvernement sur ce dossier ?

Nous reprochons au gouvernement de ne pas mesurer les enjeux de l’exploitation du fer de Falémé et ne pas faire preuve d’une capacité de négociation digne d’un État qui se soucie de l’intérêt national. Comment peut-on engager des discussions pour une concession de cette importance avec un seul opérateur choisi, de surcroit, dans des conditions que personne ne sait ? C’est grave !

Comment peut-on négliger la transformation industrielle au moment où le pays dispose d’une potentialité énergétique énorme avec la découverte du pétrole et du gaz ? C’est vraiment inquiétant ! Comment peut-on laisser au bord de la route les entrepreneurs sénégalais dans un dossier aussi crucial en ignorant leur capacité de lever des fonds et de mener à bien ce projet ? C’est inadmissible !

Pensez-vous que l’État du Sénégal a été floué dans cette affaire ?

L’État s’est floué volontairement.

Que proposez-vous à la place ?

Nous proposons que les ressources naturelles de notre pays soient gérées de façon optimale au travers du tryptique universel TOP (Transparence, Opportunité, Pertinence). En l’espèce, on s’achemine vers une attribution de gré à gré entre le gouvernement et une société turque TOSYALI, que rien ne peut justifier alors que l’appel d’offres est mieux indiqué ; c’est suspect. En second lieu, le moment est très mal choisi car un Président de la République qui remet son mandat en jeu, à quatre mois de l’élection présidentielle, ne peut raisonnablement pas prendre des décisions qui engagent le Sénégal sur plusieurs décennies et qui portent sur l’aliénation des ressources naturelles du pays. Ce n’est pas opportun. La précipitation est suspecte. En bon républicain, il devrait se contenter d’expédier les affaires courantes dans ce domaine.

Enfin, cette concession du fer de Falémé n’est pas pertinente. En effet, c’est la première fois dans l’histoire du Sénégal qu’on se trouve dans une situation aussi favorable pour faire décoller l’industrie sidérurgique. Nous avons le fer en quantité suffisante et de bonne qualité, nous disposons de l’énergie nécessaire pour le transformer et créer un secteur fort de l’acier et sa chaine de valeur notamment dans l’industrie automobile, la construction, les biens de consommation courante, l’emballage, etc….,

Nous avons le capital humain compétent pour mener à bien les projets et le besoin de création d’emplois pour les jeunes est une préoccupation fondamentale. De plus, nous avons ici la belle occasion de garantir notre autonomie en nous passant de l’importation d’un million de tonnes de fer par an, ce qui va améliorer de façon notable la balance commerciale et la balance des paiements. C’est le contexte choisi par ce régime sans ambition pour se contenter d’une concession, dans la précipitation, en contrepartie de « miettes de pain » sans aucun souci pour la sauvegarde des intérêts des générations futures. Plus décisivement, les ressources naturelles de notre pays constituent le socle de l’intégration africaine à l’image de la communauté de l’acier et du charbon, point de départ de la construction européenne.

On est à cinq mois du premier tour de la présidentielle et on ne vous voit pas, avec votre coalition FIPPU, mobiliser des foules. Pensez-vous pouvoir passer le cap du parrainage ?

L’heure n’est pas à la mobilisation des foules, elle est au travail méthodique d’implantation et de collecte des signatures pour le parrainage. Le régime de Macky SALL a dressé une haie d’épines à travers ce parrainage pensant pouvoir barrer la route aux opposants qui ne disposent pas encore d’un appareil politique éprouvé pour faire le tour du pays et collecter un nombre élevé de parrains.  C’est l’effet inverse qui se produit. En effet, tous les candidats se sont investis sur le terrain pour se présenter, décrier les dérives du régime et ses conséquences désastreuses sur la vie des populations, proposer leur programme de gouvernement, recruter et fidéliser des militants. Croyez-moi, cela se passe très bien. La haie d’épines sera enjambée.

Certains vous considèrent comme le plan B du Pds, avez-vous des discussions avec ce parti ?

Je vous renvoie à la réponse du PDS. Je vous confirme qu’en tant que candidat de la coalition FIPPU, je suis le plan A du Sénégal.

Vous avez été secrétaire général du département ministériel de Karim Wade, n’est-ce pas un motif valable pour avoir les faveurs de Wade en cas d’invalidation de sa candidature ?

Je suis fier d’avoir travaillé dans ce grand ministère où j’ai rencontré des milliers de femmes et d’hommes compétents et sérieux. Ce passage est très valorisant politiquement, il montre comment un haut fonctionnaire doit rester dans son périmètre de compétence et servir son pays, servir l’État, quelle que soit la coloration politique du ministre en charge du département ministériel. Ayons plus de respect pour les fonctionnaires. Les raisons qui peuvent justifier les faveurs de tel ou tel autre parti dans le cadre d’une entente au sein de l’opposition obéissent à des critères différents. Je ne crois pas à ce genre de raccourci.

Qu’est-ce qui motive votre candidature ?

Je me suis toujours intéressé à la politique. Déjà en 1976, élève au Lycée Blaise DIAGNE, j’ai été au RND du Professeur Cheikh Anta DIOP. J’ai vendu devant les feux rouges les journaux « SIGGI » et « TAXAW ». Puis, j’ai été membre fondateur de Ferñent, (l’Etincelle), journal de gauche. Je ne suis pas un novice en politique. J’ai, par la suite, choisi de servir mon pays en tant que soldat puis fonctionnaire. Les raisons de mon réengagement politique sont largement exposées dans ma déclaration du 15 mai 2018.

C’est la situation difficile que traverse le Sénégal. Elle est marquée par une instrumentalisation de l’État au profit d’un parti, d’une famille, par un État transformé en arme de règlement de comptes politiques. J’ai alors rejoint la coalition FIPPU ALTERNATIVE CITOYENNE car je suis convaincu que l’unité de l’opposition est une nécessité. C’est à la l’issue d’une procédure d’appel à candidatures, d’une audition devant un Comité de sélection, de la validation d’un jury d’honneur composé entre autres des coordinations régionales et enfin de la confirmation par le Directoire national que j’ai été désigné candidat de la coalition FIPPU à l’élection présidentielle de février 2019.

Quelle est votre offre alternative ?

Elle repose sur le rêve d’un nouveau souffle pour un avenir rassurant. Cela suppose des réformes profondes des institutions et des mesures économiques et sociales fortes pour changer de cap dans l’intérêt des populations, dans le cadre d’un mandat de redressement pour enfin mettre en œuvre une vision : bâtir un Sénégal prospère par un capital humain épanoui en exploitant judicieusement les ressources de notre pays dans l’intérêt de tous. Sur le plan institutionnel, une Constitution consensuelle inspirée des assises nationales et des travaux de la Commission nationale de Réforme des Institutions (CNRI) sera adoptée.

Sur le plan économique et social, des réformes structurelles et des investissements massifs seront consentis pour moderniser les secteurs porteurs d’une croissance durable et inclusive qui réduit les inégalités et élimine la pauvreté. Pour changer de cap, il faut actionner d’autres moteurs de croissance que l’endettement extérieur et le financement lié de pays étrangers.

Le changement de cap inclut aussi une meilleure répartition des dividendes de la croissance afin de corriger les inégalités et de réduire la pauvreté. Une sorte de dividende familial sera offert à travers trois leviers : éducation et formation de qualité gratuites pour les enfants et jeunes des deux sexes jusqu’à 25 ans, accès pour tous aux soins de santé de qualité avec une gratuité des médicaments essentiels et une pension universelle pour toutes les personnes âgées de 30000 FCFA (ce qui équivaut à deux dollars US par jour, soit le seuil de pauvreté)

Dans cette perspective, nous préconisons une profonde réforme du financement de l’éducation pour arriver à une prise en charge totale par l’État. Aucun parent ne devra plus débourser un seul franc pour la scolarité de ses enfants, si ce n’est un choix volontaire. La réforme de l’éducation concernera également la qualité et la pertinence des curricula, la valorisation de la fonction enseignante, l’introduction de l’enseignement religieux et des langues nationales, la rénovation et l’adaptation de l’infrastructure éducative et de formation pour éliminer tout abri provisoire et faire de nos écoles des espaces de vie et de socialisation de nos enfants. Il sera instauré un droit universel au stage et un contrat premier emploi de six mois, garanti par l’État.

Pouvez-vous revenir sur la santé ?

En matière de santé publique, l’accent sera mis sur la prévention, les infrastructures communales avec des polycliniques modernes dotées d’un plateau médical relevé et des véhicules équipés pour accéder de façon régulière à tous les coins et recoins du pays. La gratuité des médicaments sera instaurée pour les maladies les plus répandues et qui touchent les populations à faible revenu. Les coûts seront réduits pour les autres médicaments. Le personnel médical sera renforcé et revalorisé.

La sécurité ?

La salubrité et la tranquillité publiques seront obtenues. Une ceinture de sécurité sera aménagée aux frontières et sur les sites sensibles tandis que les associations de quartiers seront formées, encadrées et associés à la mission de sécurité.

La culture ?

Le potentiel culturel du Sénégal sera enfin valorisé à travers le recensement du patrimoine, la protection du personnel, la production et la promotion.

La justice ?

La politique s’arrêtera à la porte du Palais de justice et les conditions de travail seront notablement améliorées.

L’administration ?

L ’administration sera arrachée des griffes de la politique. Un appel à candidatures sera instauré pour les postes les plus importants.

Et les personnes vulnérables ?

Un Fonds de soutien aux personnes vulnérables sera mis en place pour servir un minimum vieillesse à tous (hommes et femmes), octroyer une indemnisation des victimes de la justice et de l’État dont le traitement des dossiers traine, soutenir les personnes à mobilité réduite, valoriser les pensions des invalides de guerre etc.

Avec la volonté de maintenir Aly Ngouille Ndiaye à la tête de ministère de l’intérieur, ne craignez-vous pas un hold-up ?

La crainte d’un hold-up est justifiée mais la résistance populaire est intacte. Le parrainage est le prélude d’une pagaille électorale. En tant que partie intégrante du processus électoral, le parrainage doit faire l’objet d’une surveillance par des observateurs internationaux. La complexité du mécanisme et les pratiques malsaines d’achat de conscience opérées par le régime de Macky SALL justifient ce contrôle.

Les cartes des électeurs sont retenues. Plusieurs points doivent faire l’objet d’une surveillance stricte par les institutions idoines et les membres de l’opposition. Pour l’organisation des élections, nous rejetons le rôle actuel du ministère de l’Intérieur et la nomination d’un ministre partisan. Nous préconisons la mise en place d’un organe indépendant de contrôle des élections, de bout en bout, avec une représentation des partis politiques, coalitions ou candidats.

 

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